Concert sauvage
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ACTE 1 --- LA CONSPIRATION.
Des bistrots de la place Jean Jaurès jusqu’aux caves humides tapissées de polystyrène, le mot passe et rassemble les insurgés. .
Samedi, à 17 heures aux halles Castellane, OTH attentera à la tranquillité publique. Ce ne sera pas un concert, peut-être se feront-ils embarquer avant de terminer une seule chanson. Le nombre est requis, le look de rigueur, laissez tomber la répet sabbatique, rameutez vos relations et chauffez-vous cordes vocales. Il va falloir gueuler qu’on veut cette salle, que tant qu’on aura pas obtenu satisfaction les commandos binaires pirateront la rue. Punks, rockers, hardos, babas et jeunes gens modernes, oubliez Clochemerle et révisez l’histoire. Le bouche à oreille méridional a un potentiel hors du commun et l’information se répandra comme une traînée de poudre.
En ce clément début d’automne, le moral est fort, le besoin d’action pressant.

ACTE 2-.- OCCUPATION DE LA PLACE FORTE.
Surtout ne pas perdre de temps.
Le complice intra-muros est un vendeur de fringues qui prêtera le jus depuis son magasin. Le fourgon des OTH arrive sur la place, submergé par nuée de garçons qui offrent leur aide. Les amplis passent de mains en mains, les branchements sont fébriles et l’installation de la batterie fait perdre quelques précieuses secondes ; Les cinq rétiaires sont là, cheveux courts, en guenilles, les nerfs à fleur de peau.
Et la foule impatiente réclame le début du combat.

ACTE 3 — LA BATAILLE.
Il n’y aura pas de round d’observation. Pas de balance. Le larsen sera corrigé durant la première chanson et les musiciens effectueront leurs réglages en jouant. Ça démarre.
"Croix de fer", Seigneur, comment peuvent-ils ? Ce riff est la meilleure chose qui soit arrivé au rock local. Dommage qu’il ne puisse s’écrire, sinon je vous le samplerais sur deux pages. L’urgence des missions impossibles sied à merveille au groupe qui enchaîne les titres alors qu’on pogote furieusement.
La place est à présent noire de monde. "Mutation" se fraie un chemin à coup de glaive, et on scande le refrain : UN CRI ! DÉCHIRE ! LA NUIT ! Les OTH abandonnent les références hardeuses et mitraillent le punk rock qui n’en demandait pas tant.
On est au bord de l’hystérie et soudain, les flics interviennent sous une bronca digne de Pamplona, obligeant le commerçant à couper le courant.
Spirou a le temps de balancer la revendication avant que, son micro n’expire et la cohorte des révoltés fait chorus. La première bataille est remportée avec panache.

Dernier travelling : dans les tavernes, les gueux se saoulent, fêtant leur sale victoire. Il n’y aura pas de baiser final.
L’attentat eut un réel retentissement. Dans la presse locale bien sûr, mais Best, oubliant les frasques du sieur Riberolles, relata les faits dans sa rubrique "le rock d’ici" avec photo noir et blanc.
À propos d’images, Tony Iacoponelli fixa sur sa pellicule les moments historiques, notamment la bouille hallucinée de Motch face à un képi. OTH utilisera ces éléments sérigraphiés pour la pochette de "Classé X" leur première K7, et plus tard, en 89 pour celle du 25 cm "Collector".

Quelques semaines plus tard, Eject rééditera l’événement sans aucune réaction des forces de l’ordre. Le concert se déroulera dans l’euphorie, mais le procédé sera abandonné, risquant de devenir routinier et par conséquent loin de l’objectif initial.
Notons également que les Vonn joueront au même endroit au printemps 82.
Après l’enthousiasme prometteur de la première escarmouche, l’immobilisme reprend ses droits.

CONCLUSION
Alain Voyer va utiliser l’événement.
Il faut dorénavant une salle exclusivement vouée au rock, un endroit où tous les groupes pourront se produire sans les tracas habituels, au prix d’entrée raisonnable, sans service d’ordre ni organisateur vénal. Une autogestion rock, en somme. Pour cela il va falloir tanner la municipalité, arguant que Montpellier est capable d’innovation. Si le projet aboutit, il sera sans précèdent, mais il faut d’abord se faire entendre et frapper fort, sensibiliser le public et convaincre les sceptiques. La guerre risque d’être longue, Voyer, fin stratège, dispose des flibustiers les plus efficaces, foutus de lever une armée en 3’30, les OTH.
Prendre des risques ? Ils ont inventé le terme. Pionniers dans la ville morte, ils n’ont pas hésité à tout plaquer pour vivre leurs idées, se la sautant à tous les repas, sans que leur haine salvatrice ne soit altérée. Ils côtoient l’échec et la désillusion comme les toreros tutoient la mort.
Rien à perdre, rien à gagner, le combat lui même est suffisament motivant.


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